Partager la publication "Sergi Bruguera : « J’ai joué pour la première fois de ma vie sur dur à 18 ans, à l’US Open »"
Pendant le Rolex Paris Masters 2019, Tennis Legend s’est entretenu avec l’Espagnol Sergi Bruguera. L’ex-n°3 mondial, vainqueur de 14 titres dans sa carrière (13 sur terre, 1 sur dur) en 35 finales, dont deux Roland-Garros en 1993 et 1994, est passé sur le gril de notre interview “souvenirs”. Aujourd’hui capitaine de l’équipe d’Espagne de Coupe Davis et entraîneur de Jo-Wilfried Tsonga, le natif de Barcelone a été sur la retenue concernant les anecdotes, mais il a été particulièrement intéressant sur le sujet des surfaces de jeu et de son tennis de pur terrien qu’il a dû adapter sur rapide. C’est parti !
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« Quel est le meilleur souvenir de ta carrière ?
Mon premier Roland-Garros, évidemment, quand j’ai gagné contre Jim Courier en finale.
Le pire souvenir de ta carrière ?
Les blessures sont les plus mauvais souvenirs.
Le meilleur match de ta carrière en termes de niveau de jeu ?
Quand tu joues contre quelqu’un de très fort, il est toujours plus difficile de jouer son meilleur tennis mais je rappelle d’un match en quarts de finale à Miami (en 1997), où je menais 6/0, 5/0 contre Andreï Medvedev qui était Top 6. J’ai finalement gagné 6/0, 6/3 mais c’était un de mes meilleurs matches.
Quel est le plus beau point de ta carrière ou celui qui t’a le plus marqué ?
Un point que j’aime bien et qui était important aussi, c’est la balle de set de la première manche contre Courier en finale de Roland. Je fais un décalage coup droit avec énormément d’angle. Un coup très difficile à faire et je le fais sur balle de set.
Ton plus gros craquage ?
Oh, j’en ai eu quelques-uns (rire). Cela m’est arrivé de perdre des matches 3/6, 7/6, 6/0. Quand je pétais les plombs la raquette volait aussi.
Ton plus gros regret ?
On a toujours des regrets. Il y a un match qui me fait mal. C’était une année où j’avais une blessure au genou. Je reviens et je me retrouve au Masters de Stuttgart au mois de juillet. Je menais 7/6, 5/1, 15/40, puis j’ai deux autres balles de match à 5/3, contre Muster (en 1995 en demi-finales) et j’ai perdu. Si je gagnais ce match, je gagnais le tournoi, je prenais beaucoup de points et j’étais en route pour le Masters. En plus, j’avais perdu les 4/5 derniers matches contre Muster, donc j’avais vraiment envie de le battre et je perds avec 4 balles de match. J’ai très peu perdu dans ma carrière avec des balles de match.
(Les deux victoires de Bruguera à Roland)
« Muster faisait bien son travail pour me déconcentrer. »
L’adversaire que tu n’aimais pas jouer ?
Thomas Muster.
Celui que tu préférais jouer ?
Novacek, Chesnokov, Rosset étaient des bons joueurs mais j’ai un très bon bilan avec les trois de 8 ou 9 – 0.
Le joueur le plus insupportable sur le court ?
A l’époque, j’avais pas mal de discussions avec Muster. C’était un peu chaud avec lui. Il me provoquait et je répondais de temps en temps et ça me déconcentrait. Il faisait bien son travail (rire).
Ton meilleur ami sur le circuit ?
Carlos Costa et Andrei Medvedev.
Quel était le joueur le plus antipathique sur le circuit ?
Il y avait quelques joueurs pas très sympas, mais c’était généralement une question de langue. Tu t’entends mieux avec les latins, mais je n’ai pas vraiment eu de problème avec quelqu’un en particulier.
Le joueur le plus drôle ?
Fernando Vicente était très drôle et sa manière de raconter les histoires était fabuleuse.
Ta plus grosse soirée sur le circuit ?
Je ne faisais la fête pendant les tournois. Si je perdais, je partais le jour même et, si jamais je restais, je n’avais pas envie de faire la fête. Après un titre, je célébrais avec mon équipe autour d’un dîner mais le lundi tu dois partir à un autre endroit pour jouer.
« Presque toutes les surfaces sont pareilles aujourd’hui. »
Quelles sont les principales différences entre ton époque et aujourd’hui ?
Aujourd’hui, presque toutes les surfaces sont pareilles. Sur terre, sur dur et même sur gazon, tu joues du fond du court. Ils ont ralenti tellement les courts que tu vois presque toujours les mêmes matches sur terre et sur dur. Ensuite, il y a eu une énorme amélioration au niveau physique. Aujourd’hui, tu vois des mecs de 2m qui bougent comme des mecs d’1m80. Avant les grands jouaient bien mais ils avaient du mal à bouger.
Tu as gagné 14 tournois dans ta carrière, 13 sur terre et 1 sur dur. Tu as joué 20 ans trop tôt en fait.
C’est sûr ! Cela aurait 1000 fois mieux pour moi aujourd’hui. Personne ne fait service volée, les courts sont très lents, les balles n’avancent pas trop. A mon époque, c’était injouable avec le taraflex, la moquette… Chaque semaine, il y avait un tournoi sur une surface différente avec des balles différentes et les conditions allaient de plus en plus vite. A mon époque, Becker, Sampras, ils voulaient que ça soit le plus rapide possible. Les balles ont bien changé aussi. C’est des balles de « camion ». Il faut avoir beaucoup de force pour jouer. Les joueurs qui s’appuyaient sur la balle, pas très puissants, mais qui touchaient très bien la balle ont disparu. Maintenant, il faut frapper la balle très fort pour la faire avancer.
« A Wimbledon, je faisais service-volée sur première et deuxième balle. »
Tu as gagné un titre sur dur et fait quelques finales mais comment expliques-tu que tu n’aies jamais franchi les huitièmes de finale dans les tournois du Grand Chelem, à part Roland-Garros que tu as gagné deux fois.
J’avais un jeu de spécialiste de terre battue. J’avais 18 ans la première fois que j’ai tapé la balle sur dur. C’était à l’US Open et c’était le premier match de toute ma vie sur dur. En Espagne, il n’y avait pas un seul court en dur ou indoor, mais j’ai appris assez vite. Le joueur contre qui je perds en cinq sets à l’US Open, Leif Shiras, je l’ai retrouvé au premier tour de l’Open d’Australie et j’ai gagné en trois sets. Mais j’avais du mal à bouger au début car on ne pouvait pas glisser, la balle venait très vite et les lifts faisaient moins mal, donc la stratégie était différente. La première fois que j’ai joué en Indoor, c’était contre la Russie en Coupe Davis. Je n’avais jamais tapé une balle avant. Mon jeu était très adapté à la terre et les surfaces durs ou indoor étaient injouables. A Wimbledon, je faisais service-volée sur première et deuxième balle. Tu imagines comment c’était difficile.
Tu as quand même réussi à faire quelques finales.
Sur indoor, je jouais bien. J’ai réussi à adapter mon jeu, à être plus agressif et j’ai fait finale à Miami, à Dubaï, et des demies dans des gros tournois, à Bercy notamment, mais il fallait que tout soit parfait pour que je gagne car ça allait tellement vite. Sinon, je perdais. C’était beaucoup plus difficile d’être régulier. »
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