Partager la publication "On a retrouvé l’homme qui sert à deux mains et son histoire est magnifique"

Début septembre, un de nos milliers d’espions en faction dans les clubs de France et de Navarre nous envoie une vidéo incroyable d’un homme avec un service à deux mains. Dans le milieu du tennis amateur, il n’est pas rare de trouver des personnes avec des techniques vraiment bizarres et, n’ayant aucune information sur ce joueur, nous publions la vidéo sur les réseaux sociaux en floutant son visage.
Cette dernière recueille un gros succès : 593 000 vues sur Facebook, 179 000 vues sur Instagram (vidéo à la fin de l’interview). Un petit buzz, quoi. Aujourd’hui, nous avons retrouvé l’homme qui sert à deux mains. Enfin, techniquement, il nous a retrouvé. Il s’appelle David Besse, il a 53 ans, et il nous a raconté son histoire.
» Idée cadeau : le t-shirt Tennis Legend Inbreakable
« La question que tout le monde se pose : pourquoi sers-tu à deux mains ?
Je suis handicapé des deux mains depuis ma naissance. A la main droite, j’ai seulement le pouce valide et quatre doigts atrophiés et j’ai trois doigts normaux et deux atrophiés à la main gauche, donc je ne peux pas tenir la raquette à une main. Même une petite raquette, c’est impossible.
Donc tu joues tous les coups du tennis à deux mains.
Oui, service, volée, smash, coup droit, revers, tout.
Comment en es-tu venu à jouer au tennis et quel est ton petit parcours ?
J’adore le sport et le tennis en particulier. Je me suis dit : je veux essayer d’arriver à jouer au tennis malgré mon handicap, qui est totalement opposé à la pratique de ce sport. J’ai commencé à 15/16 ans à la Roche-Posay. Je suis droitier mais je ne peux donc pas tenir la raquette à une main car je n’ai pas assez de force. Avec mon éducateur qui s’appelait Pascal Pons, il a fallu qu’on trouve une solution pour que j’arrive à servir et il m’a demandé d’essayer à deux mains. On a fait des milliers de tentatives avant que je n’arrive à mettre la balle dans le court. Au final, j’ai été 15/3 et je suis actuellement 15/5 à 53 ans.
Ça doit surprendre un peu l’adversaire ce service à deux mains.
Complètement. Maintenant, je préviens à chaque fois avant le début du match que je vais servir à deux mains et j’explique pourquoi. Et ça surprend les spectateurs aussi. Quand je fais le tournoi à Royan, il y a tous les joueurs des tournées d’été qui me regardent jouer et m’encouragent car ils trouvent ça extraordinaire.
La vidéo de ton service a été vue des centaines de milliers de fois. C’est important pour toi ?
C’est super important en termes d’image par rapport à mes proches et à toutes les personnes handicapées. Mon père a 76 ans. Il s’est mis sur Facebook pour regarder la vidéo et cela le rend fier. Dès qu’il m’appelle, il est tout fou : « Tu as tant de vues, je regarde tes commentaires. » Je suis sans arrêt filmé par des mecs qui trouvent cela bizarre et c’était parfois dur pour mes parents et ma famille car il y a eu des moqueries, mais cela t’endurcit le caractère et j’ai toujours réussi à dépasser ces choses-là grâce au sport.
As-tu un message à faire passer et des valeurs que tu voudrais transmettre ?
J’assume complètement mon handicap grâce à mes proches et grâce au tennis. C’est une belle école de la vie et j’ai réussi à faire de mon handicap une force. Il faut oser, être persévérant, ne rien lâcher et cela m’a servi à faire une belle carrière professionnelle également (Cadre supérieur et directeur de secteur au Crédit Agricole). J’ai une phrase fétiche que je reprends tout le temps dans le sport et professionnellement : Si tu veux réussir, ne limite pas tes défis mais défie tes limites.
Je suis très impliqué dans le handicap au travail. Pour moi, on ne peut s’assumer que si on assume son handicap et le handicap permet d’avoir une force mentale exceptionnelle. Je pense même que cela m’a permis d’aller encore plus loin que si je n’avais pas été handicapé. Par exemple, sur un terrain, je m’accroche comme un chien comme si je jouais ma vie car mon handicap me permet de décupler des forces que je ne pourrais pas décupler si j’étais valide. A Royan, j’étais content quand j’entendais des entraîneurs dirent à leurs joueurs : « Vous pleurez quand vous avez une ampoule. Regardez, il n’a pas de doigts, il se tord le dos, il a mal, mais il s’accroche tout le temps le Monsieur. »
Quand on est handicapé, on peut être comme les autres et même meilleur que les autres. Voilà le message que j’ai à faire passer. »
//php echo do_shortcode( "[yuzo_related]" ); ?>